La trahison du prolétariat par la gauche est bien connue (La deuxième droite, Garnier et Janover, 1986. Sisyphe est fatigué, Serge Halimi, 1993). Celle des écologistes l’est beaucoup moins. Elle était enfouie dans la grande fosse d’aisance de la gauche. L’en extirper nous prémunira peut-être contre les faux espoirs, le ressentiment, voire l’impuissance.
Par sa culture libertaire, son refus de la société industrielle et de son gouvernement technocratique, l’écologie se met immédiatement en porte-à-faux avec les politiques traditionnelles. La gauche, plutôt que d’entretenir un conflit électoralement désastreux avec les écolos, opère un aggiornamento tactique. En 1972, le célèbre rapport du Club de Rome sur les Limites de la croissance lui offre de traduire la révolte de la jeunesse dans son langage gestionnaire. Claude Perdriel, riche industriel des toilettes chimiques et patron du Nouvel observateur, fonde avec quelques « Amis de la Terre » le bimestriel Le Sauvage, à fin explicite de récupérer, broyer et évacuer les idées les plus fertiles surgies de mai 68.
Cette récupération / liquidation s’est rejouée maintes fois depuis. Les lecteurs de Renart l’ont lue à propos de transition énergétique, d’intelligence artificielle, ou d’ingénierie reproductive. Ils sauront désormais de qui descendent les derniers gestionnaires du désastre, les planificateurs écologistes et autres « technocritiques ».